jeudi 28 novembre 2019

Poète, l'après-midi

Le jour en est à son automne.
Les feuilles mortes du temps
Tombent.
Parfois trébuche un instant,
Il s'excuse auprès des vivants
Dérangés dans leurs orbites.
Le ventre du monde
Est plein de somnolences.

Lui, il range ses pensées du matin.
Il allume le perchoir
Pour en attirer d'autres
Au gras des heures lentes
De l'après-midi.
Il vacance, il flasque, il oisive.
Protégé de l'ennui
En vertu du contemplé.
Il se soucie peu de nous.
Nos trajectoires imbéciles
L'indiffèrent.

Il est déjà dans la nuit
Qui tendra sa nappe d'encre
Sur le prochain banquet
De papier.
Il renverse un peu de patience
Et se prépare un thé,
En attendant.

mercredi 20 novembre 2019

Ce que sait la forêt

C'est un pas qui jamais
N'aura l'écho des lois
Le cuir et la boue
Rejouent la noce
Le souffle a son content
De sentiers éperdus

Qui me dit que ces sentiers sont muets ?
Ils bruissent de tous leurs yeux
Et sont les amis
De mon parfait secret
Ils sont la pâture
Où je défroque mes évidences
pour mieux les cerner de doutes

Les paupières d'écorce
Ouvrent d'impossibles retraites
Que je me plais à montrer du doigt
Pour signaler la dupe
Que je ne suis pas

Pupilles rieuses
Vous ridez les feuilles
Qu'agitent mes intranquillités
Souterraines
Ma caverne est votre arène
Et nous livrons combat

Œillades obliques
Aux détours des silences
Il n'est pas une goutte de sève
Qui ne sache jusqu'à mon nom

Aucun habitant de m'épargne
Son clin d'œil
Je suis livré
Je suis l'ivresse
Qui me gagne
Vaincu
Par le cuir
La boue
Le sentier
Et tous ses regards

19 novembre 2019

Forêt, je ne sais pas
Je devrais te...
Mais muet
Mots retenus, pas envie de sortir
Forêt, je te prie de m'excuser
N'est pas Tolkien qui veut
Difficile de te...
Tu vois, forêt
Astérix ne se pose pas de questions
Merlin non plus
Ni Robin, ni Jean-Pierre
Moi, forêt, je te...
Ne sais pas le dire
Pas ce soir
Pas magique
Tu me dis : mange
Tu me dis : chante
Mais moi, non
Je te...
Forêt, je te déçois
Évidemment
Et toi, bientôt
Tu me Soignes
_______________________________________________

C'est un pas qui jamais
N'aura l'écho des lois
Le cuir et la boue
Rejouent la noce
Le souffle a son content
De sentiers éperdus

Qui me dit que ces sentiers sont muets ?
Ils bruissent de tous leurs yeux
Et sont les amis
De mon parfait secret
Ils sont la pâture
Où je défroque mes évidences
pour mieux les cerner de doutes

Les paupières d'écorce
Ouvrent d'impossibles retraites
Que je me plais à montrer du doigt
Pour signaler la dupe
Que je ne suis pas

Pupilles rieuses
Vous ridez les feuilles
Qu'agitent mes intranquillités
Souterraines
Ma caverne est votre arène
Et nous livrons combat

Œillades obliques
Aux détours des silences
Il n'est pas une goutte de sève
Qui ne sache jusqu'à mon nom

Aucun habitant de m'épargne
Son clin d'œil
Je suis livré
Je suis l'ivresse
Qui me gagne
Vaincu
Par le cuir
La boue
Le sentier
Et tous ses regards

mardi 12 novembre 2019

21 octobre 2019

Tu viens, tu te fais tout petit, de peur de bousculer les idées reçues sur sa grandeur, et tu ne peux t’empêcher de lire, dans le regard de la forêt gigantesque, l’infinie modestie qui te la rend si proche.

Tu y vas pour cueillir le silence à sa source, mais il t’échappe indéfiniment jusqu’au moment où tu comprends que la forêt parle et que l’écouter te procure le plus beau des silences.

Tu es marcheur silence, elle est forêt calme, et vous êtes rencontre paix au cœur de l’écorce abri.

Tu ne marches pas pendant la forêt, tu dévisages ton autre qui t’observe à travers le feuillage de ton cœur.

Accordez-moi une goutte de la forêt, seul antidote de mes pensées vénéneuses.

Si les arbres élèvent la canopée à ce point, c’est parce que la forêt pense tout haut ce que d’autres n’osent dire tout bas.

Admirable amiral, lève l’ancre de ta forêt navire, et vogue sur l’océan vert où les hiboux sont des mouettes et les sangliers, des coups de canon !

si la forêt pleure
si la forêt se dévêtit
si la forêt grince
si la forêt murmure
si la forêt abrite
si la forêt chasse
si la forêt flambe
si la forêt se languit
si la forêt se montre perplexe
elle n’en demeure pas moins
la forêt malgré tout.
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Ma forêt vit à l’angle de mes songes et de mes divagations
Ma forêt s’y plante bien, racines heureuses dans l’humus de notre voisinage
Ma forêt et moi, c’est quelque chose.

Quelque chose comme un mystère qu’on n’aurait pas envie de réveiller
Quelque chose d’humide dans un instant sec
Quelque chose que j’ai envie de dire à l’oreille de l’arbre

Cet arbre qui tend le creux de ses branches à nos questions
Cet arbre qui répète sans cesse la tendresse de son écorce
Cet arbre qui te toise du plus affectueux des regards

Et je regarde ma forêt
Et je regarde ce quelque chose
Et je regarde cet arbre
Et chaque fois, ce que je vois
Manifeste résolument l’infinie beauté

D’une âme apaisée

17 mai 2019

Comprenez-nous
nous ne prétendons pas que
maintenant
c’est mieux
ce n’est pas ça
avant
c’était bien aussi
c’est juste que
maintenant
c’est autre chose
parfois infiniment
semblable

Comprenez-nous
toujours la même peur
de mourir -
pourquoi penser à KFC ? -
mourir
sans avoir vu l’aiguille de diamant
sans avoir enjambé les racines des hêtres
sans avoir souri à la voisine
sans avoir pris du repos sur un banc
sans avoir regretté de ne pas avoir pris le vélo

Comprenez-nous
toujours la même angoisse
de s’endormir -
paresse de mouton -
s’endormir
sans avoir lu le dernier suspense
sans avoir reconnu la mélodie
sans avoir vaincu la forêt en poussette
sans avoir goûté au serein de la marche
sans avoir pesté sur cette douche trop hâtive

Comprenez-nous
maintenant
toujours le même espoir
de s’éveiller -
à plus tard, Morphée -
s’éveiller
avec en nos mains pleines
la même glaise
que vous aviez déjà
façonnée
pour les mêmes rêves

avant
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L’avenir
cette vie fantasmée
crainte ou espérée
fantasmée de toute façon
l’avenir, donc,
sous quelque forme qu’on se le représente
l’avenir
serait cette rencontre radieuse
encore que radieuse
pourrait sonner faux
pour les âmes tortueuses
que nous nous plaisons à être
un peu fleur bleue
woodstock émancipé
bref
l’avenir serait cette rencontre radieuse, donc,
entre nos rêves éclairés
éclairés parce qu’un rêve est forcément
plus près de notre réalité
de la compréhension intime
de notre réalité
que notre réalité même
si tant est qu’on accorde
un minimum
de crédit à notre subconscient
donc, l’avenir serait cette rencontre radieuse
entre nos rêves éclairés
et notre réalité tangible
c’est-à-dire palpable
c’est-à-dire blessante
c’est-à-dire aussi
salutaire
par sa proximité avec nos névroses
et nos bonheurs
alors, donc, l’avenir, serait cette rencontre radieuse entre nos rêves éclairés et notre réalité tangible
si nous parvenions à remettre en question
sans pour autant rejeter
le rejet a ceci de négatif qu’il blesse l’amour propre
avec lequel nous avons nourri justement
ce quotidien qui est le nôtre
donc, l’avenir serait cette rencontre radieuse entre nos rêves éclairés et notre réalité tangible si nous parvenions à remettre en question le quotidien d’aujourd’hui
parce que c’est aujourd’hui qu’il faut agir
c’est maintenant
demain il sera trop tard
et autres aphorismes de bon aloi
maintenant, donc
si nous parvenions à remettre en question le quotidien d’aujourd’hui
afin d’en réchapper plus ou moins saufs
réchapper pourrait aussi sonner faux
ou tout au moins tragique
nuançons
en réchapper ou en renaître
note d’espoir
tout n’est pas noir
en réchapper plus ou moins saufs
parce que se pose toujours la question
des séquelles
des blessures
de l’âme
l’avenir est le réceptacle
des blessures de l’âme
autre aphorisme
pas mal, celui-là
Des questions ?

8 mars 2019

La boîte a ceci de néant
Qu’elle s’ignore dans l’armoire.
Mimant un mutisme béant
Et sans voir les secondes choir.

Or elle est vide, cette boîte.
Ma mains le dit, mes yeux le voient,
Et ma bouche de rester coite.
Ma déception n’a pas de voix.

Pour le café du petit-déj,
Pas de filtre, me dites-vous ?
Pas le moindre, ni blanc ni beige ?
Suis déconfit, je vous l’avoue.

D’ailleurs, que vont dire mes mains
Privées du geste du pliage ?
Ni aujourd’hui, et ni demain
Pas de petit plaisir volage ?

Elles qui aiment tant plier
Le filtre, avant de le placer
Dans la machine au fil lié
À la prise d’un blanc glacé.

Elles, privées de ce plaisir,
Me rendraient bien un peu coupable
De déguster, non, de saisir
Ce nectar, assis à ma table.

Bah ! Du soluble ce sera.
On ne pliera pas aujourd’hui.
Au supermarché on ira,

Buvons café et passons l’huis !
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Salut. T’es nouveau dans le coin ?
Je veux dire, c’est la première fois qu’on te voit ici, non ?
Oui, c’est bien ce que je dis, t’étais jamais venu.
Au cas où tu ne sais pas, c’est l’armoire de la cuisine ici.
Tu vois, là, c’est le café, par exemple. C’est mon pote, on travaille ensemble.
Comment ?
Ben, on fait le café du patron, quoi.
Enfin, on participe au projet, si tu veux. Y a aussi la cafetière, mais elle n’est pas dans l’armoire et… comment ?
Ah oui, c’est un temps plein. Tous les jours. 7 sur 7, ouais ouais.
Ah ? Toi aussi. Tous les jours ? À peu près.
Des quoi ? Des pics de consommation selon les repas ? Qu’est-ce que tu veux dire ?
Ah ! Carrément ? T’as besoin de copains pour prendre le relais ? Dis donc, mais c’est quoi comme boulot ?
Mais c’est dégueulasse ! C’est super crade comme boulot ! Puis reste pas contre moi, là, c’est dégoûtant. Nom de dieu, t’as pas à être ici, c’est pas la bonne armoire, vieux. Ici, c’est les trucs à bouffer, c’est pas pour... après.
T’y peux rien si on t’a mis ici ? Ouais, mais quand même, comment tu peux faire ce boulot, mec ?
T’as pas le choix ? Ben, je te plains, alors. Pfouh ! Un vrai boulot de merde. Oh, pardon.
Et... ça passe comment, si je ne suis pas indiscret ?
Ah oui ? Il te déshabille, feuille par feuille ? Ou il prend plein de feuilles à la fois. Et puis ?
Oh ! Tais-toi, va, ça me donne la nausée. Mon gars, qu’est-ce que tu dégustes. Moi qui me plaignais parfois quand je bosse, à cause de la chaleur, et puis parce que je suis tout mouillé, mais bon, c’est du bon café. Je peux bien fermer ma gueule. J’ai un boulot en or, moi. En plus, je vois bien que quand j’ai fait mon job, le patron, il est content, ça lui fait plaisir.
Ah ? Toi aussi ? Bon, ben, c’est toujours ça de pris, hein ?

11 février 2019

Ce matin-là, j’avais envie,
Mais je me suis cogné au réveil.
Ce matin-ci, j’aurais aimé,
Mais je me suis cogné à la liste des courses.
Ça me rappelle cet autre matin où j’aurais bien,
Mais où je me suis cogné à la tondeuse à gazon.
Et ce midi-là ? Je n’aurais pas dit non,
Mais je me suis cogné à la bulle à verre.
Ce qui me fait penser à cet après-midi : j’avais décidé,
Mais je me suis cogné à des pots de peinture.
C’est sans commune mesure avec cette avant-soirée, où j’étais prêt,
Mais où je me suis cogné à l’interro de géométrie.
Ou encore ce soir-là, lorsque j’ai eu l’intention,
Mais que je me suis cogné à une forte odeur d’égout dans la cave.


La vie te régente, la vie te cadenasse, la vie est une cogne.
Tes petites envies ? Elle s’en cogne.
Alors, faut voir à avoir de la pogne

Si tu veux vaquer à tes propres besognes.
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Mesdames et messieurs, nous entrons donc dans la maison d’un humain du XXe ou XXIe siècle, on n’est pas sûr… pardon ? Oui, madame, l’homme existait déjà... Non, ce n’est pas seulement une légende. Donc, vous disais-je, nous entrons et tout de suite, j’attire votre attention sur cette particularité c’est que les maisons, à  cette époque, étaient pourvues de toilettes. Oui, à cette époque, les gens s’isolaient pour déféquer et uriner... oui, c’est une drôle d’idée, oui... Alors, vous découvrez maintenant à votre droite le salon, on passe, c’est assez banal et tout de suite je vous montre la cuisine. Oui, une cuisine dans une maison particulière, il faisaient encore eux-mêmes à manger, chez eux, chacun pour soi. Vous voyez, il y a un four, un frigo… Pardon ? Oui, tout est d’époque, même le contenu du frigo. Vous remarquerez la présence d’un lave-vaisselle, c’était en vogue à l’époque. Maintenant on jette, avant ils nettoyaient.

Alors, je vous invite à me suivre à l’étage… Non, madame, toutes les maisons n’avaient pas d’ascenseur… Donc, à l’étage, tout de suite à votre droite, une salle de bains. Alors, la fonction principale de cette pièce est encore inconnue. Certains pensent à une pièce de rituels, on ne sait pas, en tout cas, celle-ci n’était pas beaucoup utilisée, ça on le sait grâce aux archives. En face de la salle de bains, et tout le long du couloir, ce sont des chambres. En tout cas, comme on les concevait à l’époque, c’est-à-dire avec des lits. Les gens se couchaient dessus… oui, se couchaient… Oui je ne vous le fais pas dire, c’est une histoire à dormir debout… Vous remarquerez dans ces deux chambres-ci une grosse quantité de tasse, d’assiettes, de restes de nourriture, donc on suppose que c’étaient aussi des salles à manger. ALors, un peu plus loin, sur votre droite, vous avez une pièce plus grande remplie de papiers divers, avec des chiffres, beaucoup de chiffres. Pardon, ? Les chiffres ? C’est une forme de langage, une langue morte aujourd’hui, oui, oui… Bien, dans la petite pièce à côté, vous verrez quelque chose qu’on ne trouve plus que dans les musées, excusez-moi, je vous précède, voilà… Est-ce que quelqu’un sait ce que c’est ? Oui, madame ?... Un livre ! Parfaitement. C’est un livre, un petit objet qui ne servait à rien mais qu’on trouvait souvent chez les gens de cette époque… Vous en avez aussi avec des images dedans, dans des cases, oui. Mais suivez-moi à l’étage, il y a quelque chose que je voudrais vous montrer… Oui, désolé madame, encore des escaliers… Voilà, nous arrivons donc dans une autre chambre, toujours avec un lit, plus grand, mais bon, c’est un lit. Mais regardez ceci. Rien n’a été bougé, vous voyez. À côté du lit, vous avez cette table avec une lampe, deux pierres dont on ignore la nature mais surtout, surtout, regardez-bien, vous avez là trois livres posés les uns sur les autres. Vous voyez ? Trois livres, comme ça, c’est sûrement quelque chose de l’ordre du rituel, ça aussi, une sorte d’installation, de kern, je ne sais pas, c’est peut-être religieux… Pardon ? Oui, on a examiné les livres, ils contiennent des écrits dont certaines phrases se terminent par un même son, c’est bizarre… Pardon ? Oui, ils semblaient consacrer un grand intérêt pour des futilités et… Voilà, vous m’ôtez les mots de la bouche, cher monsieur, c’est, de toute évidence, ce qui les a perdus.

23 janvier 2019

L’heure, frémissante, annonce le destin.
J’arrive tôt, espoir d’une place de choix.
Un coin.
J’arrive tard, promesse de rame bondée.
Inconfort.
Concurrence d’une poussette.
La porte s’ouvre et m’engouffre.
Je déploie ma bulle autour de moi.
Rempart.
Je suis seul dans l’espace exigu du métro.
Pourtant, j’ai tout un univers dans mon sac.
J’ouvre mon sac et sors l’univers.
Il a toute sa place dans la bulle.
Il s’étend à l’infini.
Je m’y love.
Bésicles sur les yeux.
Le défilé commence.
Pendant ce temps-là, les stations défilent.
Le temps file.
Trop vite.
Pas le temps.
Temps d’arrêt ?
Tout mon temps…
Enfin dehors m’intime.
J’obtempère.
La bulle, l’univers, tout rentre dans le sac.
Ce sera pour le prochain déploiement.

Et c’est comme ça de livre en livre.
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Trajet GPS poétique…

Allumer.
Encoder.
Suivre la voie.
Suivre la voix.
En route.
Aie confiance.
Crois en moi.
Croisez la voie.
Croassez, corbeaux, il fait noir.
Noir sans sucre, café serré
Serré dans le métro
Mais trop de métro tue le métro
Alors, changement de voie
Vois donc où tu roules !
Tu roules des mécaniques devant une flamande assurée ?
Susurrée, la proposition.
Hésitation ?
Je t’indique.
L’indic a tout balancé
Lancé à plein tube, tu serpente dans les pentes
Pantomime, doigt pointé
Oui, suis-le, c’est par là
Tu t’égares
Mais point de trains
Train d’enfer dans les rues sombres
Sombre cette journée dans l’océan du soir
Sois ravi, sois ravel
Pavane
Vanne ouverte du bonheur
Ne r’viens pas trop tard
T’as rendez-vous demain
Deux mains sur le volant
Lente manœuvre
œuvre à venir
Venir à l’écrit
Et puis revenir
Par la même voie
Par la même voix.