mardi 11 juillet 2023

Suggestion

Et pourquoi pas un sourire ?

Il en passe, parfois,

Dans les ombres du soir

Comme un vol d’hirondelles

Empressées.


Et pourquoi pas l’aile du bonheur

Sur nos têtes inquiètes ?

Après tout, il est à tout le monde,

Comme ce chemin vers les vignes

Loquaces.


Et pourquoi pas un mot ?

Il viendrait du cœur.

Il viendrait à propos

Pour faire taire les angoisses

Nées des ombres du soirs,

Loin du chemin vers les vignes.


Au fond, pourquoi pas ?



                Auderghem, juillet 2023

mercredi 28 juin 2023

Celui-là qui passe

Regardez-le venir
C’est un homme nouveau
Bois neuf, fraîchement sculpté
Voyez son pas assuré
Il suit la route
Sans un regard en arrière
L’a-t-on déjà vu ici ?

Il laisse dans son sillage
Quelques mots choisis
Une idée de poème
Sur la première étoile du soir

Déjà, il s’éloigne
Il a le front des horizons
Un chien peut-être le suivra
Et puis le vent
            toujours
                            curieux

Il a des rêves de cloître
Il songe aux amis
Au chaud des familles
De tout cela, il fait une chanson
Qu’il mâchonne
Pour sa saveur de vie


Auderghem, juin 2023

mardi 23 mai 2023

Nuit, bientôt

Bien sûr tu tardes un peu à venir

Tu es la nuit d’été

Nul ne te presse


Au bout du chemin de soleil

Il n’y a plus que l’ombre

Avec ce qu’elle a de tapi

Pour nourrir les intranquilles


Ceux-là se languissent de toi

J’entends leur sabbat

Ils ne verront pas la voûte piquetée

Ils ne seront que ténèbres


Parfois je suis comme eux

J’attends le supplice de ton silence


Au fond, je ne t’ai jamais connue

Que comme un amie redoutable

Lame froide

Et toujours sur ton billot

Je reviens


                                                                                Auderghem, mai 2023


mercredi 17 mai 2023

Des gens et moi

Des gens respirent en moi.

Leurs souffles m’irriguent.

Ce sont eux que je sens couler

Dans mes artères,

Que mes veines charrient.

Ils sont l’air.

Mais parfois, cet air est nauséabond.


Des gens bougent en moi.

Je sens leurs gestes effleurer ma peau

De l’intérieur.

Des coudes, des talons, des doigts tendus.

Ça me bouscule les tripes.

Mais parfois, quand je perçois les jambes,

Je leur emboîte le pas

Et je vais un peu plus loin.


Des gens crient en moi.

Une chorale de souffrance,

Une foule de joies,

Le charabia des voix

Comme un défi à mon silence intime.

Quand ils parlent tous, comme ça,

Je reste moi-même sans voix.

Mais ce n’est pas faute de hurler pour les faire taire.


Des gens vivent en moi.

Ils m’occupent à tous les étages,

Ils m’arrangent à leur goût,

Et c’est parfois d’un laid !

Mais il y a toujours une exception,

Une lampe sur un guéridon

Qui m’incite à m’asseoir

Et à regarder vivre cette masse palpitante

Depuis une de mes fenêtres intérieures. 


Des gens meurent en moi.

Et je n’ai alors pas assez de larmes

Pour noyer leur absence.

Je leur creuse un oubli,

Je les ensevelis de bonne terre,

Et je regarde ailleurs

De peur de les regretter.

Mais pas tous.

Certains, je les brûle, je les disperse,

Sûr de ne pas les regretter.


Des gens sont moi.

Et je ne les trouve pas très fréquentables.

Si j’étais moi, je les chasserais.
Mais je ne suis pas moi.

Eux le sont.

Eux

Qui respirent

Qui bougent

Qui crient

Qui vivent

Qui meurent


Et je ne sais même pas qui ils sont !



                                                                                                                Auderghem, mai 2023

lundi 1 mai 2023

Meurtri

Celui qui marche là a froid.

Pour toute protection,

Il porte une chemise ouverte,

Déchirée.

Elle ne le protège pas du vent que les autres soufflent sur lui.

Un vent mordant,

Faiseur d’entailles.


Et les autres en rient.

Et les autres en rajoutent.


Lui, il ploie, dos voûté,

Attendant la fin de la bise,

Et le retour de la paix.

La violence, il ne sait pas.


Celui qui marche là trouvera-t-il une autre chemise ?







                                            Auderghem, mai 2023

mardi 18 avril 2023

Kintsugi

À Laure


J’ai parfois besoin que tu me répares

Il y a longtemps que je ne suis plus intact

Si je me brise, c’est parce que ma main n’est pas sûre

Elle me lâche

Maladroite

Et la chute est toujours dure

Le claquement sec

C’est le chant des éclats

Mais de lui tu crées une mélodie

Qui se rabiboche avec l’harmonie du monde

Chacun de tes gestes est un baume

Avec patience

Tu recolles les morceaux

Et fais couler l’or dans les sillons

Que la vie âpre creuse en moi





                                Auderghem, avril 2023


jeudi 6 avril 2023

Offrande

Parfois, la Bête s’ébroue

Chasse sa torpeur

Étend ses membres affamés

Elle renifle de ses immenses narines

Un parfum noir

Elle sait qu’on la craint

Elle en joue


Nous avons plus que jamais besoin de l’apaiser

Non par des offrandes de sang

Mais par des offrandes de paix

Cœur ouvert

La Bête n’aime pas les cœurs ouverts

C’est la seule chose qui puisse l’anéantir




                            Auderghem, avril 2023