lundi 28 mars 2022

15 mars 2022

Lieu où l'on aimerait rêver

C'est une toute petite planète
Qui n'est pas exempte, cependant,
De la prétention des minuscules.
Pardonnable travers
Si l'on tient compte
De ce fait peu commun :
Elle abrite un réverbère.
D'allure parfaitement classique,
Dans un alliage connu de l'univers seul,
Il pointe parfaitement droit
Et trace, avec la sphère sur laquelle il repose,
Le point d'exclamation de votre stupeur.
Nulle lumière, non.
L'instant laisse aux étoiles
Le monopole de la merveille.
Une proposition propice à la rêverie, non ?
C'est cela, installez-vous.
Acceptez, du réverbère, l'invitation
À poser votre dos
Sur sa fraîcheur métallique
Fermez les yeux,
Le temps d'un battement d'éternité.
Puis, ouvrez-les sur l'immensité.
Ça y est, vous avez commencé à rêver.
Vous avez entendu, quelque part,
Le soliloque du renard
Le froissement du crayon sur la laine du mouton
L'enfant qui ne sait ce qu'est le cambouis
Mais sait déjà tout des roses...
Et si vous restez là assez longtemps,
Alors même que vous n'aurez pas vu
La nuit tomber ou le jour se lever,
Vous entendrez le pas habitué
De l'allumeur de réverbère
Qui vous saluera
Tantôt d'un bonsoir,
Tantôt d'un bonjour.


Et toujours sur les traces du Petit Prince, le basculement dans le rêve...

Je t'entends, renard
Je t'entends, rose
Gare à ses épines
Gare à ses canines

J'entends ton mouton,
Petit Prince
Qui n'a pas appris à dessiner
Mais n'a besoin d'autre compagnie
Que celle d'un réverbère
Et d'une mèche
Tantôt de jour
Et tantôt de nuit

J'entends le chant des sphères
Au plus profond du cambouis
Et j'y poserais bien les fondations
D'une rêverie

Mais entendez, à votre tour,
Les interjections de mes bielles
Et la promesse du vent sur mes ailes
Ça y est ! mon moteur tourne
D'un claquement de capot
Je cesserai de jouer à l'immobilité
Je vais bientôt m'ébrouer
Et dans l'azur parader

Voyez les déserts de nuit
Et leurs menaces tapies à l'arête des dunes
Voyez les cimes acérées
Qui dérouleur leurs mâchoires aveugles
Voyez cette terre des hommes
Que je m'applique à faire rougir
En la lorgnant sans innocence
Voyez les lumières inquiètes
Qui implorent du paysage
Le droit de m'accorder l'asile

Voyez tout cela comme je vous ai entendus,
Renard, rose, Petit Prince et réverbère,
Et dites-moi si mes rêves
Ne valent pas ceux d'un écrivain.
 

mardi 22 mars 2022

Cela en valait-il la peine ?

Pourquoi ce voile sur mon sourire ?

Pourquoi ce pas hésitant à l’orée de la nuit ?

Ai-je à payer un écot au simple fait de vivre ?

Déjà trois questions.

J’abuse.

Il n’y a pas de quoi en faire tout un poème.

Oh ! rien qu’un tout petit.

Pour la forme.

Pour dire qu’il existe.

Juste entre lui et moi.

Il n’a pas beaucoup d’allure.

Je le trouve même gringalet.

C’est vrai, regardez-le.

On dirait qu’il s’excuse.

Un oisillon a plus d’audace.

Donc, un poème.

Pour quoi ?

Pour un sourire voilé ?

Pour un pas hésitant ?

Tout ça pour ça.





Auderghem, mars 2022

dimanche 6 mars 2022

Mouvement continu

Cela sans crier gare
À pas de plume
Tout au plus des signaux de fumée
Mais de feu, point
Il a de ces froideurs

Il cultive la discrétion
Comme on feint le néant
En plein flagrant délit
Avec aplomb

Il ne pipe mot
D'ailleurs, il ne sait pas comme il s'épèle

Dites-lui de s'arrêter un moment
Il accélère le mouvement
Col relevé
Gêne
Il ne voulait pas être vu

Il déteste être interrompu
Il sait que c'est possible
Un coucher de soleil
Un enfant qui dort
L'ombre d'un clocher
Un regard de toi
Sont autant de coups d'arrêt
À son entrain trop jovial

Au fond, il est toujours gagnant
Il est le poisson qui ignore l'hameçon
Ça énerve le pêcheur

Mais rien à faire
Il veut et il aura le dernier mot
Il se campe sur nos vies
Qu'il écrase de sa masse
Pourtant, il ne que fait que passer

Le temps