lundi 31 décembre 2018

Haïkus d'hiver


Couché dans mon lit,
Je me prépare à la nuit.
J'ai les pieds glacés.


Un petit vent frais.
Et tous les oiseaux qui chantent
Me parlent du monde.


Je suis immobile
Et mon chien court dans les bois.
Fait plutôt frisquet.


Dans le parc gelé,
Suis-je vraiment seul au monde ?
Un oiseau qui chante.


Ce soir froid, qu'en dire ?
Étalé de tout son long,
Mon chien se prélasse.


Ces cris dans le froid,
C'est un arbre qui piaille.
Ou bien des oiseaux ?


Dans ma rue, pénombre.
L'eau luit de cent scintillements.
Et mon chien renifle...


Dans la nuit, je marche.
La glace sur les voitures
Crée des œuvres d'art. 


L'éveil des bourgeons,
Avec qui le partager ?
Un chien qui trottine.


L'âme vagabonde
Dans la lumière dorée.
Au loin, le printemps.


Sous un soleil froid,
La mésange vient me voir.
Petite papote.


Calme, ce matin.
Oui, la tempête est partie.
Bruyant souvenir.


Février s'endort.
Une lampe dans la nuit.
Tiens, oui, c'est la mienne.


Sommeils agités
Les premiers jours de janvier.
Des pas dans la nuit.


Et puis, tout à coup,
J'entends un autre silence.
Le printemps approche.


Depuis tout à l'heure,
La neige étend son empire.
Tiens, oui, quel silence !


La ville s'éveille
En ce matin froid et noir.
Je ne dors donc plus.


Matin clair et froid,
Et l'ombre de la maison.
Tableau de Magritte.


Titre du tableau :
Corneille sur lampadaire.
Clair-obscur d'hiver.


Perdu dans mes songes,
Une rencontre imprévue.
Chaleur de l'hiver.


Le vent joue de l'orgue
Dans l'immense cathédrale
De hêtres. Croient-ils ?


Quel est ce bipède ?
C'est le héron sur le toit.
Printemps en avance...


En bas, bruits divers.
Un lève-tôt interrompt
Mon rêve d'hiver.


Une bière brune
Et un recueil de poèmes.
L'hiver en douceur.


L'hiver a semé
Le silence dans les rues.
Ça sent les vacances.


Or, je m'interroge :
Ma casquette tiendra-t-elle ?
De la pluie, du vent.


Je suis allongé,
Le piano suspend le temps.
Je retiens l'hiver.


Balade du soir,
Mes pensées partent en fumée.
Cet hiver s'estompe.


Dans le ciel sans voile,
La lune suit mes pas lents.
Bonne idée, l'écharpe. 


Rires de poivrots
Dans la station de métro.
Agapes d'hiver.


Je bois mon café.
Petite branche se plie
Sous son poids de neige.


On parle en anglais
Dans ce métro surchauffé.
Presque au bout du livre.


Allure plus lente.
Peut-être peur de tomber ?
Mes pas dans la neige


Musique et poèmes
Pour une soirée d'hiver.
Dans un monastère.


Non, je n'aime pas
Les pavés gras de janvier.
Signé : le vélo.


Bien plus agité
Que cette nuit d'hiver froide.
Raté le sommeil.


Et ce jour d'hiver
Qui se termine en musique.
Le début de quoi ?

mercredi 26 décembre 2018

Douce nuit

Depuis qu'il a vu le jour, l'humain est fasciné par la nuit.
Elle exerce sur lui un charme tantôt inquiet, tantôt apaisé.

Une chose est sûre, elle l'inspire.
D'ailleurs, c'est à foison que l'on puisera des odes aux heures nocturnes dans le grand vivier de la littérature. Je me limiterai ici à deux poèmes rencontrés au hasard de mes lectures.

L'un est de Marina Tsvétaïéva, poétesse russe du début du XXe siècle. Il est extrait de son recueil "Insomnie" (Gallimard)

Voici encore une fenêtre
où encore on ne dort.
Peut-être – on boit du vin
peut-être – on est assis.
Ou simplement ils sont deux
qui ne défont pas leurs mains.
Dans chaque maison, ami,
il y a une fenêtre ainsi.

Cri des ruptures et des rencontres,
c'est toi, fenêtre dans la nuit !
Peut-être – centaines de chandelles,
peut-être – trois chandelles.
Non, point de repos
pour mon esprit.
Dans ma maison toujours
il en fut ainsi.

Prie, ami, pour la maison sans sommeil,
pour la fenêtre éclairée.




L'autre est de Claude Roy, poète français du XXe siècle également. Il est extrait de son recueil "Au sommeil la nuit", édité dans "Poésies" (Gallimard)

Elle est venue la nuit de plus loin que la nuit
À pas de vent de loup de fougère et de menthe
Voleuse de parfum impure fausse nuit
Fille aux cheveux d'écume issus de l'eau dormante

Après l'aube la nuit tisseuse de chansons
S'endort d'un songe lourd d'astres et de méduses
Et les jambes mêlées au fuseau des saisons
Veille sur le repos des étoiles confuses

Sa main laisse glisser les constellations
Le sable fabuleux des mondes solitaires
La poussière de Dieu et de sa création
La semence de feu qui féconde les terres

Mais elle vient la nuit de plus loin que la nuit
À pas de vent de mer de feu de loup de piège
Bergère sans troupeau glaneuse sans épis
Aveugle aux lèvres d'or qui marche sur la neige.


Pour ma part, la nuit est un territoire d'écriture. Non pas la nuit insomniaque et fiévreuse des petites heures du matin ou du sommeil impossible à trouver. Elle est, heureusement, rare.

Non, simplement l'obscurité. Le noir d'un soir, tombé tôt en hiver. Cette noirceur-là est propice aux histoires. Ce que l'œil ne voit pas, l'imagination le perçoit. Rien à voir dehors, tout est intérieur. Rideaux fermés, plume ouverte...

Et point trop de quidams pour être dérangé. Un peu de misanthropie de bon aloi. L'heure des visites est passée, on n'y est plus pour personne. On en est peut-être plus généreux, d'ailleurs. Porte close, cœur ouvert...

J'aime la nuit pour la liberté que j'y trouve.
Soleil éteint, esprit ouvert...

mercredi 19 décembre 2018

Des petits oiseaux sans histoire


Petits oiseaux, de Yôko Ogawa, est une petite perle, un petit moment suspendu.

On y rencontre deux frères dont on suit la vie, depuis leur enfance jusqu'à la mort du cadet.
L'aîné est handicapé. Il vit dans son monde et ne parle d'autre langue que l'ancien parler des oiseaux. Et seul son frère cadet le comprend. Le plus jeune va consacrer sa vie à s'occuper de son aîné, qui n'a de véritable intérêt que pour les oiseaux. Il s'occupe de la volière de l'école voisine. Il meurt prématurément et le cadet prend le relais. Il sera le monsieur aux petits oiseaux.

Voilà, c'est tout.

Il ne se passe rien. Si rien ne sont des sucettes achetées au magasin du coin, chaque mercredi. Ou une histoire d'amour en devenir mais toujours en suspens.

Dans ce conte philosophique moderne, l'auteure nous invite à côtoyer les personnages dans une intimité qui se tisse au fil des pages alors que rien ne survient. Si ce n'est un quotidien lissé par l'érosion des habitudes.

Moi qui suis plutôt friand d'histoires, justement, je me suis laissé surprendre. J'ai vite compris que je n'allais pas être témoin d'aventures extraordinaires. Et c'était bien. Ce livre est une méditation, il est fermement ancré dans le présent de ses personnages. Chaque moment de lecture est une parenthèse salutaire.

Une invitation à apprécier le peu.



mercredi 12 décembre 2018

Pourquoi n'y a-t-il pas de cours d'écriture en académie ?



Si vous avez envie d'apprendre le piano ou le chant lyrique, l'art dramatique ou la peinture, le solfège ou la sculpture, vous avez l'embarras du choix. Dans quasiment chaque commune du pays, vous trouverez une académie. Académie des Beaux-Arts ou académie de musique (qui inclut généralement les arts de la parole).

Mais quid de l'écriture ?

À ma connaissance, l'écriture ne fait pas partie du programme des académies. Et celle ou celui qui veut apprendre à écrire des nouvelles, des romans ou des poèmes doit se tourner vers des ateliers ou des cours privés.

Pourquoi ?

Est-ce parce que l'apprentissage de l'écriture est inscrit dans les programmes scolaires ? Certes. Mais on n'y apprend pas, pour autant, à concevoir une nouvelle ou un roman. L'école se limite à la sphère technique de l'écriture, sans aborder la dimension artistique. Cet aspect de l'apprentissage pourrait être assumé par les académies. On y trouve bien des cours d'écriture musicale (donc, de composition) alors, pourquoi pas des cours d'écriture littéraire ?

Les formations en atelier, via des ASBL ou des particuliers, ne manquent pas. Mais elles sont souvent proposées à des prix qui peuvent décourager les meilleures volontés. L'inscription dans une académie représente un budget nettement plus abordable. Voilà qui pourrait ouvrir des portes...

Pour autant, de tels cours auraient-ils du succès comme les cours de piano ou de théâtre ? J'avoue ne pas connaître la réponse. Peut-être ces cours d'écriture en académie n'existent-ils pas tout simplement parce qu'on s'est déjà posé la question de leur opportunité et qu'on a constaté un engouement insuffisant pour les instaurer ? Les parents se projettent peut-être plus facilement dans un.e futur.e pianiste que dans un.e futur.e auteur.e...

Qui sait ?



mercredi 5 décembre 2018

Écrire, c'est... ?

J'ai de la chance.

Je voulais recenser des citations d'écrivain.e.s sur l'acte d'écrire.
Je commençais donc à sillonner la toile en quête de ces déclarations quand je suis tombé sur une vidéo dans laquelle plusieurs auteur.e.s s'expriment à ce sujet.
Du pain béni pour mes doigts paresseux ! Y a plus qu'à regarder. Merci de m'avoir lu et à bientôt...



Une chute en entraînant une autre, je suis également tombé sur cette page web regorgeant de citations.
Nous avons là assez de matière.

Un constat s'impose, même s'il est prévisible : il y a autant de définitions de l'écriture que d'écrivain.e.s. Question de personnalité, de sensibilité, de nécessité.

Cependant, la définition que j'affectionne le plus est celle de Christian Bobin :
"Écrire, c'est dessiner une porte sur un mur infranchissable, et puis l'ouvrir."

Je m'y retrouve. J'aime cette idée d'ouvrir une porte et d'inviter qui le souhaite à entrer pour découvrir ce qui est écrit. J'apprécie cette invitation.

Pour ma part, écrire, c'est raconter une histoire. Elles sont nombreuses à germer en moi. Les plus éphémères ne durent que quelques secondes. Certaines ne sont que des débuts, d'autres des fins. Les plus coriaces finissent par se laisser coucher sur le clavier. Il y a celles qui, aussitôt apparues, m'impriment une urgence d'écriture. Et celles qui prennent leur temps, tergiversent, se font oublier, puis réapparaissent. Elles seront peut-être écrites, un jour.

Quoi qu'il en soit, il y a toujours cette envie de raconter. Je ne suis pas conteur, plutôt raconteur. J'ouvre la porte de mon imaginaire, et qui passe devant peut entrer à sa guise.