La main tendue ne touche rien.
Est-ce l'air qui manque ?
Poèmes, haïkus, réflexions, idées, coups de cœur et autres raisons d'écrire un mot ou deux...
Et si, chaque fois que je me couchais, je vous racontais une histoire qui n’a pas eu lieu ?
Est-ce qu’on en ferait une habitude de brioche, chaude du four et de la nuit, pour la main gourmande qui sait le lendemain ?
On dirait que ce serait vrai. Même pour le rouge-gorge. Et le coup du sécateur.
On dirait qu’on y croirait, au moins. Ne pas décevoir l’illusion, elle peine tant à sourire.
On dirait que ce n’est pas grave si d’autres pensent le contraire, puisque nous, nous pensons à l’endroit.
On dirait qu’à la prochaine lune, on ferait un tas de toutes ces histoires, et on les flamberait avec nos larmes. Et ça ferait rire les gens.
Formons un demi-cercle et une pensée affable.
Je prends mon élan et je plonge la main dans l’infini des histoires.
Ah ! non, j’en prends une autre : celle-là, elle a eu lieu.
J'ai ouvert le carnet
Pour y poser je ne sais quoi
Un souvenir vert
Mes yeux fatigués
Une idée préconçue
Ou la vérité du silence
J'ai reçu en écho
Un battement de vie
Un regard plus droit
Trois instants furtifs
J'y ai gagné !
La chaleur n’a pas grelotté son dernier mot
Le dormeur n’a que faire de ce linceul
La nuit sera pourpre
Tant de pas qui n’auront pas été faits
L’huis les a envoûtés
Pour qu’ils cessent leurs songes d’horizons
Là demeurent ceux qu’un mur obtempère
Prêts à payer au jour le tribut de ses rayons
Déjà le cristal des enfants
Tinte au fond des lits
Où se jouent par avance
Les vécus qu’ils ne connaîtront peut-être pas
Tandis que rongent les hâtes obstinées
Jusqu’à la moelle du silence
Alors, la dernière main
Fera se taire le dernier rideau
Et la chaleur guettera
Le premier signe
Du premier éveillé
À l’orée de cette
Nuit d’été
Toscane, juillet 2020
Qu’auront à me dire les ombres ce soir ?
Quels secrets ?
Quels murmures ?
Aurais-je l’oreille assez prudente pour ne pas croire aux alouettes de la nuit ?
Que lirais-je entre les lignes des étoiles ?
Je n’ai pas l’habitude de m’y hasarder.
Mes bésicles sont maladroites et balbutient parfois des inepties.
Au fond, si je laissais simplement l’obscur m’inonder de sa clarté ?
Les réponses s’agitent en d’autres instants, impatientes mais retenues.
Nuit, je suis prêt à te recevoir.
J’oublie les blés des jours et les collines du soleil.
Je m’en remets à ton jugement.
Toscane, juillet 2020
La nuit aboie
Elle déchire les rêves
De ses canines
Et renvoie le dormeur
À d’autres inquiétudes
La nuit aboie
Parce qu’un sanglier
Parce qu’un renard
Parce qu’un rôdeur, peut-être
Seule l’ombre le sait
La nuit aboie
Son écho d’encre
Au creux des vallées
Elle écrit l’histoire
Qui fera le rêve du chien
La nuit aboie
De tous ses yeux ouverts
Elle sillonne à grandes foulées
Son territoire à défendre
Face aux menaces celées
La nuit aboie
Et c’est le monde entier
Qui gronde dans les gorges des gardiens
Plus peureux encore
Que ceux qu’ils protègent
La nuit aboie
Elle enrage de n’avoir pu les éveiller tous
Malgré la ferveur de ses cris
La nuit jure
Qu’elle fera mieux la prochaine fois
Ce ne sont pas des champs de blé où la moissonneuse a tracé ses sillons.
Ce sont des échantillons de velours étendus par un tailleur omniscient.
Ce ne sont pas des collines, ça et là parsemées de bois.
Ce sont des vagues ocres sur lesquelles mousse une écume rebelle.
Ce n’est pas un ciel bleu limpide.
C’est une toile de lumière où les oiseaux deviennent ombres chinoises.
Ce ne sont pas des lignes électriques qui viennent allumer les masures.
Ce sont des bras tendus qui dressent une barrière au néant.
Et au-delà du velours, des vagues, de la toile et des bras,
Les vagabonds stellaires attendent la nuit
Pour leurs agapes tonitruantes.
Toscane, juillet 2020
Il y a d’abord, et surtout,
Le silence
Bien sûr, ce sont aussi les grillons
Ou les cigales
Je n’ai jamais su faire la différence
Bien sûr, ce sont aussi
Les infinies vibrations
Des insectes secrets
Existence furtives
Bien sûr, ce sont aussi
Deux tourterelles
Qui se parlent du haut de deux cyprès
Elles s’invectivent, peut-être
Bien sûr, ce sont aussi les chiens
Qui grognent leurs jeux
Ou aboient une tortue téméraire
Bien sûr, ce sont aussi des voix
Qui deviennent parfois rires
Au cœur des braises solaires
Mais il y a d’abord, et surtout,
Le silence
Toscane, juillet 2020
Plus de mots au bout des yeux
Plus de bruits au creux des doigts
Le silence saisissant
À peine l'épaisseur d'un galet.
Une suffocation ?
Pourtant le caddie est plein
La semence crépite.
Y a-t-il accord tacite
Entre le détaché et l'attente ?
L'heure s'impatiente.
Alors, il puise dans l'eau possible
Cette poignée d'encre
Et trace d'un trait
Certes ébloui de stupeur
L'espoir d'un poème