J'ai suivi la 34e Horde.
J'ai suivi la trace du neuvième Golgoth.
J'ai atteint l'Extrême-Amont du roman d'Alain Damasio, "La Horde du Contrevent".
Ce ne fut pas un chemin facile.
La quatrième de couverture parle d'un auteur qui écrit peu par exigence.
Je veux bien le croire. L'écriture est en effet exigeante. C'est de la virtuosité. À l'excès.
Trop souvent, je n'ai vu qu'elle. L'arbre qui cache la forêt de l'histoire.
"La horde du Contrevent" m'apparaît comme un exercice de style. À l'instar de certaines mélodies de Paganini. Virtuose lui-même, il composait pour les virtuoses. Je n'ai peut-être pas l'oreille assez formée, mais quand je l'écoute, je n'entends plus la mélodie. J'entends la sueur du musicien. J'entends sa prouesse. J'entends l'archet prendre feu. Cela me distrait et je rate ce qui fait la beauté de l'œuvre : son cœur. Quand la virtuosité en arrive là, elle devient défaut. C'est souvent comme telle que je la ressens.
Je ne doute pas un seul instant qu'Alain Damasio ait mis tout son cœur dans l'écriture de ce roman de haut vol. Il y a mis bien plus que son cœur et cela se lit trop. Habituellement, j'aime sentir la présence de l'auteur dans un livre. Cela crée une connivence qui me plaît. Ici, je me suis senti bousculé et parfois, exclu. Il n'y en avait que pour lui. J'avais le sentiment qu'il écrivait pour atteindre une maestria plutôt que pour m'atteindre, moi, lecteur.
Quoi qu'il en soit, l'histoire est prodigieuse, haletante. Sans elle, je n'aurais pas été jusqu'au bout. Je regrette d'avoir eu la vue gênée par cet arbre. J'aurais aimé le réduire, d'un coup de cognée, afin de mieux apprécier, de mieux saisir, l'ample beauté de la forêt qu'il s'ingéniait à me cacher.