Vous avez dans vos cales
Les couleurs des étals
Et les cris des vendeurs.
Pastèques, tissus, alcools à deux sous.
Une foule de sourires
Et l’âme de tant de peuples.
Vous avez la vie des hommes.
Je suis une lumière dans la nuit.
Vous avez dans vos conteneurs
Les heures harassantes des ouvrières esclaves
Pour un linge plus étincelant
D’une simple pression sur un bouton.
Et les écrans trop luisants
Où défilent les héros des enfants.
Vous avez le luxe des hommes.
Je suis une lumière dans la nuit.
Vous avez dans vos voiles
Les vagues de toutes les mers,
Les cris des mouettes et les yeux des poissons,
Les reflets du bois précieux alangui sur le pont
Et le soleil emprisonné dans les lunettes noires.
Vous avez l’horizon des hommes.
Je suis une lumière dans la nuit.
Vous avez dans les yeux
Le sourire de la mort
Qui vous regarde en face
Et vous dit “je t’attends”.
Vous avez dans les mains
Les écueils incertains
Qui tendent leurs bras d’écume
Pour mieux vous décevoir.
Vous avez dans les tripes
La peur de n’être plus,
La peur de ne pouvoir dire adieu
À ceux qui vous espèrent.
Vous avez dans le cœur
Le poids des choses non faites,
Des mots non dits,
Des aubes ratées.
Vous n’avez plus que moi.
Je suis votre lumière dans la nuit.