vendredi 17 février 2017

Les pêcheurs



Le combat de cannes au bord de l’étang

S’éternise depuis la nuit des temps.

Ils se font face, sentinelles alertes ;

La carpe et le goujon vont à leur perte.


Les pêcheurs, armés de leur hameçons,

Encerclent l’étang où les âmes sont.

Cannes alignées comme des ceps de vignes,

Jetant leurs cris de mort au bout des lignes.


Le temps, ici, suspend sa marche lente.

Pas de précipitation qui le tente.

On attend. Mais pas l’attente fébrile

Des premiers rayons du soleil d’avril.


On attend comme on espère un ami

Au détour d’un soir, après les semis.

On attend, l’âme nimbée de patience,

On parle avec son voisin d’espérance.


Et pendant ce temps-là, l’eau frémissante,

Se plaît à jouer avec l’air qui vente,

Dessinant, dans mille miroitements,

Mille soleils dans leur éclatement.


Un ballet de songes vient à l’esprit,

Pareil à la paix lorsque le cœur prie.

À cette danse, le regard s’étonne.

Sous la surface, la carpe questionne,


Se pose la question du carpe diem :

Or, vais-je offrir au pêcheur ce qu’il aime ?

Cette lutte inégale, et même indigne,

Qu’à la fin je perds sur toute la ligne ?


Loin de ce questionnement intérieur,

Le quidam en promenade est rieur.

Car il sait que, depuis la nuit des temps,

La pièce se joue au fond de l’étang.


                                                                                                    Auderghem, 2017

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