lundi 17 octobre 2016

La fin du festin

Après la mort de sa femme,

Il a commencé à couper les arbres

Sa manière de briser le drame

Sève écoulée plutôt que marbre


Son chagrin sous le bras,

Bâton de pèlerin triste

Il lance des abracadabras

Au son rauque d’un cistre


Ses pas s’accentuent de ses vertus

Sous la poigne de la mort qui le chasse

Oh ! j’ai dit ces mots qui tuent

Il rêve que demain tout se refasse


Une place, un manège de foire

Prise électrique, robes de froufrou

Les enfants vêtus de moire

Qui tête blonde, qui cheveux roux


Entament une danse éperdue

Aux quatre coins de leur naïveté

Comme une offrande due

À l’instantané de l’été


Et lui, toujours allant

Accueilli dans les foyers

Où la mère filant

À l’ombre du noyer


Prépare un nectar du Brésil

“Café chaud, j’adore”

Fait-il, et comme un grésil

La tasse son âme redore


La route est longue, toute de cailloux hirsute

Elle s’étale à l’abandon de ses pieds

Où chaque pas qui presque le rebute

Coûte un chiffonnage amer à son coeur de papier


Ô route ici implacable

Dans ton évidente nécessité

Il ne s’en croit pas capable

Il sait pourtant la vérité


Elle, la douce, est partie,

Flammèche soufflée par un abrupt destin

Et c’est une vie anéantie,

Et c’est la fin du festin.



                                                                                                                Bruxelles, 2016